Stratégie de la CEDEAO contre le terrorisme

Télécharger le fichier PDF

Declaration Politique et la Position Commune de la CEDEAO en Matière de lutte Contre le Terrorisme

Declaration Politique et la Position Commune de la CEDEAO en Matière de Lutte Contre le Terrorisme

Nous, Chefs d’État et de Gouvernement de la Communauté Économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO);

 Réaffirmant nos engagements envers le Traité Révisé de la CEDEAO signé à Cotonou, au Bénin, le 24 juillet 1993, notamment, l’article 58 du traité, qui enjoint les États membres à oeuvrer à la préservation et au renforcement des relations propices au maintien de la paix, de la stabilité et de la sécurité au sein de la Communauté;

 Considérant l’article 3 (paragraphe 4) du Protocole A/P1/12/99 relatif au Mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des con its, de maintien de la paix et de la sécurité, signé à Lomé, au Togo, le 10 décembre 1999; le paragraphe 40 du Cadre de prévention des con its de la CEDEAO MSC/REG.1/01/08, signé à Ouagadougou, au Burkina Faso, le 16 janvier 2008 et l’article 24 (2) du Protocole A/SP1/12/01 sur la démocratie et la bonne gouvernance additionnel au Protocole relatif au Mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des con its, de maintien de la paix et de la sécurité, signé à Dakar, au Sénégal, le 21 décembre 2001;

 Considérant les mesures prises par la Communauté en vue de promouvoir et de consolider la coopération entre les États membres en matière pénale, à travers la Convention A/P1/7/92 de la CEDEAO sur l’entraide judiciaire en matière pénale, signée à Dakar, au Sénégal, le 29 juillet 1992; la Convention A/P1/8/94 sur l’extradition, signée à Abuja, au Nigeria, le 6 août 1994; le Protocole de non- agression, signé à Lagos, au Nigeria, le 22 août 1978, le Protocole A/SP3/5/81 sur l’assistance mutuelle en matière de défense, signé à Freetown, en Sierra Leone, le 29 mai 1981 ; la Convention A/P5/5/82 sur l’assistance administrative en matière douanière, signée à Cotonou, au Bénin, le 29 mai 1982; le Protocole A/P1/01/06 instituant le Bureau de renseignement et d’enquête criminelle signé à Niamey, au Niger, le 12 janvier 2006 ; la Convention de la CEDEAO sur les armes légères et de petit calibre, leurs munitions et autres matériels connexes, signée à Abuja, au Nigeria, le 14 juin 2006 ; ainsi que la Déclaration Politique sur la prévention de l’abus de drogues, le tra c illicite de drogues et la criminalité organisée en Afrique de l’Ouest;

 Considérant la Convention de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) sur la prévention et la lutte contre le terrorisme, signée à Alger, en Algérie, le 14 juillet 1999 qui, entre autres, prévoit une définition commune des actes terroristes en Afrique, son Protocole additionnel, signé à Addis Abéba, en Ethiopie, le 8 juillet 2004 et le Plan d’action de l’Union africaine sur la prévention et la lutte contre le terrorisme en Afrique adopté à Alger, en Algérie, le 14 septembre 2002; ainsi que diverses décisions adoptées par l’Union africaine relatives à la prévention et à la lutte contre le terrorisme en Afrique;

Guidés par les principes, les règles inscrites dans les conventions et protocoles universels et les résolutions pertinentes des Nations unies (ONU) sur la prévention et la répression du terrorisme, en particulier les résolutions du Conseil de sécurité, notamment 1373 du 28 septembre 2001, 1267 du 15 octobre 1999, 1540 du 14 avril 2004 et 1624 du 14 septembre 2005; les résolutions de l’Assemblée générale sur les mesures de prévention et d’éradication du terrorisme et la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations unies du 8 septembre 2006, ainsi que d’autres résolutions relatives à la prévention et à la lutte contre le terrorisme, adoptées par les Nations unies et ses agences;

 Inspirés par l’article 5 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, signée le 27 juin 1981 à Nairobi, au Kenya, qui stipule que tout individu a droit au respect et à la dignité inhérente à la personne humaine et à la reconnaissance de sa personnalité juridique. Toutes formes d’exploitation et d’avilissement de l’homme, notamment l’esclavage, la traite des personnes, la torture physique ou morale, et les peines ou les traitements cruels inhumains ou dégradants sont interdits; et l’article 29 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée à New York le 10 décembre 1948, qui dispose que, dans l’exercice de ses droits et dans la jouissance de ses libertés, chacun n’est soumis qu’aux limitations établies par la loi exclusivement, en vue d’assurer la reconnaissance et le respect des droits et libertés d’autrui et a n de satisfaire aux justes exigences de la morale, de l’ordre public et du bien-être général dans une société démocratique;

 Conscients du fait que la région de l’Afrique de l’Ouest est affectée par le phénomène du terrorisme, et que les conditions propices à la propagation du terrorisme sont complexes et nécessitent des politiques robustes et proactives visant à remédier aux facteurs sous-jacents économiques et sociopolitiques qui donnent lieu à ou alimentent des actes de terrorisme;

 Sérieusement préoccupés par les récentes manifestations d’activités terroristes au sein de la Communauté, notamment, les attentats à la bombe, les attentats suicides, les enlèvements, les prises d’otages, les détournements, les massacres de masse, les crimes odieux, la piraterie et les actes de sabotage de biens publics et privés, ainsi que les incendies et profanation des lieux religieux et autres sites sacrés;

 Notant que ces actes ont entraîné des pertes en vies innocentes, des blessés graves, des destructions de propriétés, la propagation de la peur et de l’intimidation, ainsi que d’autres rami cations humanitaires de grandes portées;

 Convaincus que les actes terroristes sous toutes leurs formes et manifestations constituent des crimes graves et agrants qui violent les droits humains fondamentaux, notamment les droits à l’intégrité physique, à la vie, à la liberté de vivre à l’abri de la peur, à la liberté et à la sécurité, et à l’aggravation de la pauvreté par leurs effets débilitants sur le développement économique et la cohésion sociale;

Préoccupés par le risque que les terroristes acquièrent des armes de destruction massive, tels que des agents de guerre biologiques, chimiques et nucléaires et autres matières radioactives dans le but de commettre des actes terroristes;

 Conscients que les terroristes exploitent le cyberespace à des ns de recrutement et de propagande, ainsi que pour la plani cation et l’exécution d’actes terroristes, comme les attaques ou des menaces d’attaque contre des ordinateurs, des réseaux informatiques ou autres systèmes d’information scienti que et technologique ; dans l’intention d’intimider, d’instiller la peur, ou de contraindre un gouvernement, une entreprise privée ou une frange de la population dans le seul but d’atteindre des objectifs politiques, idéologiques ou sociaux, que ce soit directement ou indirectement;

 Gardant à l’esprit les liens entre le terrorisme et d’autres formes de criminalité transnationale organisée comme le tra c de drogue, le tra c d’êtres humains ou la contrebande d’armes, ainsi que la prolifération illicite des armes légères et de petit calibre, la corruption et le blanchiment d’argent;

 Déterminés à éliminer et à bouter hors de la région le éau du terrorisme et à créer un environnement propice à une intégration régionale effective, au développement économique, à la paix, à la sécurité et à la stabilité en Afrique de l’Ouest;

 Soulignant que toutes les activités entreprises pour prévenir et combattre le terrorisme doivent être compatibles avec les engagements internationaux des États en matières de respect des droits humains et du droit humanitaire, notamment le Pacte international des Nations unies relatif aux droits civils et politiques, signé à New York le 16 décembre 1966;

 Convaincus que la réalisation de cet objectif exige un engagement résolu et sans faille des États membres devant agir en étroite collaboration, à tous les niveaux, de même que des mesures intergouvernementales en matière de surveillance des frontières de partage régulier des informations concernant les réseaux de criminalité nationale et transfrontalière, d’entraide mutuelle en matière pénale, d’enquête et de poursuite des présumés terroristes ainsi qu’en matière de saisie et de gel des avoirs et des nances des terroristes, et

 Désireux d’établir un cadre commun pour l’action et la coopération intergouvernementale sur des questions pratiques de prévention et de lutte contre le terrorisme et de créer des synergies entre les activités des États aux niveaux national, régional et international.

Par conséquent, la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement déclare solennellement qu’elle:

  1. Condamne sans équivoque le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations, y compris les actes d’enlèvement, de détournement d’avion, de prise d’otage, de demande de paiement de rançon, d’attentat à la bombe sur les propriétés publiques et privées et les infrastructures critiques, les actes de sabotage ou la profanation des lieux religieux et autres sites sacrés;
  2. Condamne également tout mouvement, groupe ou individu utilisant toute différence religieuse, ethnique, sociale ou culturelle pour inciter ou s’adonner à la violence et autres activités hostiles causant la mort, des blessures ou des destructions de propriété, dans l’intention d’intimider ou de contraindre un gouvernement, une entreprise privée ou une frange de la population dans le but d’atteindre des objectifs politiques ou sociaux;
  3. Est déterminée à prendre toutes les mesures nécessaires pour traduire en justice toute personne ou entité qui participe au nancement, à la plani cation, à la coordination ou à l’exécution d’actes terroristes. À cet égard, les États membres doivent geler ou con squer sans délai les fonds et autres avoirs nanciers ou ressources économiques des personnes, organisations ou groupes qui recrutent sciemment des individus pour encourager, faciliter, inciter, nancer, participer ou agir en tant que complice dans la plani cation, le nancement et l’exécution d’un acte terroriste ou d’un de ses liens mentionnés ci-dessus, que ce soit directement ou indirectement;
  4. Réaffirme son engagement à s’abstenir d’encourager, de faciliter, de nancer ou de tolérer des activités terroristes par essence ou de toute complaisance s’y rapportant; ainsi qu’à empêcher que nos territoires soient utilisés comme des refuges pour l’entraînement, la plani cation et l’exécution d’actes terroristes;
  5. Appelle tous les États membres, en particulier ceux qui ne l’ont pas encore fait, à considérer comme une question d’extrême urgence la rati cation immédiate et/ou l’adhésion à toutes les Conventions et Protocoles pertinents de la CEDEAO (comme indiqué dans l’annexe I), la Convention de l’OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme et son Protocole, ainsi que les dix-huit conventions et protocoles universels relatifs à la prévention et à la lutte contre le terrorisme (comme indiqué dans l’annexe II);
  6. Demande en outre à tous les États membres de mettre en place des mesures opérationnelles pour assurer la mise en œuvre intégrale et effective des instruments juridiques de contre-terrorisme mentionnés au paragraphe 5 ci- dessus, y compris la promulgation et l’application des législations nationales appropriées qui criminalisent les actes terroristes et prévoient des peines sévères à l’encontre des auteurs de tels actes, la création des mécanismes ou des centres nationaux de coordination, et la disposition de tirer pro t des programmes d’assistance technique existant, ainsi que l’adoption de la Loi- modèle africaine contre le terrorisme;
  7. S’engage à renforcer la coopération, les synergies et les efforts communs dans les domaines de la collecte et du partage des renseignements, de l’enquête, des poursuites et de l’application de la loi en matière de prévention et de répression du terrorisme;
  8. Encourage les organisations de la société civile et les organisations non gouvernementales pertinentes, y compris les médias, à travailler en collaboration avec les États membres a n de coordonner et de renforcer mutuellement leurs activités visant à prévenir et à combattre le terrorisme au sein de la Communauté;
  9. Adopte une politique de tolérance zéro contre le terrorisme au sein de la Communauté. Dans ce contexte, une menace terroriste pour un État membre constitue une menace pour toute la Communauté. En appliquant cette politique, les États membres rejettent catégoriquement tout prétexte impliquant l’économie, la politique, la philosophie, l’idéologie, la race, l’ethnie, la religion, la culture, la médecine et la santé ou d’autres motifs pour justi er l’exécution d’un acte terroriste à l’intérieur ou à l’extérieur de la Communauté et/ou par un citoyen de la Communauté;
  10. Réaffirme l’engagement des États membres à respecter le droit international et à rationaliser toutes les activités de prévention et de lutte contre le terrorisme sur la base du droit international humanitaire et des droits de l’homme, notamment de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, de la Charte africaine sur les droits et le bien-être de l’enfant, de la Déclaration universelle des droits de l’homme, de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. À cet effet, tous les États membres abhorrent collectivement la torture et autres traitements dégradants et inhumains in igés aux présumés terroristes et s’engagent à renforcer les pratiques démocratiques et la primauté du droit, a n de garantir une procédure régulière, un procès équitable et l’égalité devant la loi pour tous les citoyens;
  11. Décide d’adopter la Stratégie de lutte contre le terrorisme de la CEDEAO et son Plan de mise en œuvre, basée sur une approche intégrée contenant un vaste ensemble de mesures devant être prises par divers organismes dans les États membres et fournissant une orientation stratégique en vue du con nement et de l’élimination de la menace posée à la Communauté par le terrorisme. À cette n, la Conférence approuve la création au sein de la Communauté, comme préconisé dans la stratégie: a) d’une unité de la CEDEAO pour la coordination de la lutte contre le terrorisme ; b) d’un Mandat d’arrêt de la CEDEAO; c) d’une Liste noire de la CEDEAO des réseaux terroristes et criminels, a n de faciliter la coordination et le partage d’informations entre les États membres; et d) d’un Centre sous-régional de formation en matière de lutte contre le terrorisme;
  12. Demande au Président de la Commission de soumettre, à la prochaine session de la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement, des propositions détaillées sur les modalités opérationnelles, y compris les implications budgétaires et les sources de nancement pour les mécanismes mentionnés au paragraphe ci-dessus;
  13. Demande en outre au Président de la Commission de soumettre à la Conférence un rapport annuel sur l’état du terrorisme en Afrique de l’Ouest, notamment sur les menaces et les vulnérabilités, ainsi que sur les mesures prises par les États membres et la Commission en vue de la mise en œuvre de cette Déclaration et de la Stratégie de la CEDEAO mentionnée au paragraphe 11 ci-dessus;
  14. Prie la communauté internationale, ainsi que les institutions d’assistance technique, les partenaires du développement, les organisations internationales compétentes et les organisations de la société civile à coordonner leurs activités avec la CEDEAO et à renforcer le soutien nancier, matériel et technique (y compris la formation, la recherche et l’échange d’informations) en vue de la mise en œuvre effective de la présente Déclaration et de la Stratégie susmentionnée, et
  15. Décide de rester saisi de la question.

Adoptée à Yamoussoukro, en Côte d’Ivoire, le 28 février 2013

 

Share on :

Twitter Facebook Google Plus Linkedin Youtube Instgram